AlainH

 

 

 

 

 

 

UN POTAGER D'AGREMENT

Qu'est-ce qu'un beau potager? C'est une belle parade de légumes en lignes successives; carottes prêtes à être croquées, haricots verts en fleurs, salades ventrues, tomates gorgées de soleil, bref des légumes appétissants qui ne demandent qu'à être récoltés. Les potagers de notre enfance ou de nos rêves ressemblent certainement à cela. Les jardins actuels se veulent des parcs en miniature avec gazon anglais, végétaux sans problèmes d'entretien, et pavés auto-bloquants, et il est si facile d'aller remplir son panier au supermarché; pourtant les potagers font de la résistance! Car qui n'a pas rêvé de récolter des radis ou des tomates juste avant de passer à table! Des légumes sains, non traités, qui ont un goût unique parce qu'ils sont le fruit de notre patience et de notre sueur!

UN JARDIN POTAGER, POURQUOI, POUR QUELS BESOINS ?

De nos jours il est rare que l'on cultive un potager pour vivre en autarcie, c'est-à-dire produire suffisamment pour couvrir tous les besoins d'une famille qui se limite bien souvent à 3 ou 4 personnes; alors à quoi bon un potager grand comme un champ? Et puis l'espace et le temps manquent, et le jardinage doit rester un passe-temps agréable ou tout du moins peu contraignant.
Le "bio", l'écologie, des notions courantes maintenant, montrent combien nous sommes désireux d'un retour à la nature, à l'authentique. Le jardinage, c'est si bon, (pas pour le dos peut-être), pour combattre le stress. Alors un petit coin suffit à faire pousser quelques salades, radis ou plans de tomates.
Et ce petit coin sera pour vous, puis pour vos enfants un champ d'expériences, un apprentissage de la vie, de la nature.
Si vous débutez un potager, commencez petit! libre à vous de l'agrandir, si vous y prenez goût.

SITUATION - EXPOSITION

Un potager bien tenu, n'a pas besoin d'être exilé au fond du jardin, là où même vous, n'allez que rarement. Etant donné qu'il accueillera aussi des plantes condimentaires, il serait judicieux de le rapprocher de la cuisine et de prévoir un chemin propre même par temps de pluie.
Choisissez un espace aéré et ensoleillé. Le manque d'air et de soleil favorise l'humidité: ne comptez pas récolter des tomates saines dans ce cas.

LE TERRAIN

Composition: Terrain acide, basique ou neutre: difficile de le savoir, à moins de le faire analyser. Généralement c'est un mélange, et on fera avec! Dans notre commune la terre est composite: des couches de sable, de marnes glaiseuses, des cailloux; l'impression générale est celle d'une terre lourde mais riche, convenant à de nombreux végétaux, (excepté les plantes de terre de bruyère).
Ce qui compte le plus c'est que le sol soit fertile. En utilisant régulièrement le compost par exemple, en travaillant et en cultivant judicieusement la terre, on en augmentera la fertilité.

Pour commencer considérons la terre comme une matière vivante: chaque couche est habitée par des animaux qui lui sont spécifiques. Le plus connu est le ver de terre parce qu'il est le plus grand donc le plus visible. Il digère les substances organiques formées par les matières végétales et animales en décomposition et les transforme dans son corps en terre très fertile. Ses excréments sont beaucoup plus riches en azote, phosphore, calcium et magnésium que la terre normale.
Comme lui, d'innombrables bactéries, animaux microscopiques présents dans le sol, transforment la substance organique en les décomposant et en les dégradant en substance inorganique que les plantes peuvent alors assimiler. Plus il y a d'organismes vivants dans le sol, plus il y a de nourriture disponible dans le sol pour les plantes. On les protégera donc en couvrant le sol avec du "mulch", (paillage), on les nourrira et on stimulera leur activité avec du compost et des engrais verts, (voir n°4 sur l'arrosage et n°5 sur le compostage). L'activité de ces animalcules dépend aussi de la température et de l'humidité du sol: l'augmentation des températures la stimule; trop d'eau ou pas assez la freine.
Ces êtres minuscules absorbent des substances nutritives et les stockent; à leur mort ces réserves sont à nouveau disponibles pour les plantes: dans les méthodes "bio" on n'utilise que des engrais naturels, organiques qui ne peuvent être utilisés par les plantes qu'après avoir été décomposés par les micro-organismes du sol.
On peut très bien emprunter à la culture "bio" cette façon de jardiner puisqu'elle est naturelle, qu'elle respecte la nature et ceux qui y vivent; et parce qu'un potager dans nos jardins modernes est plus un art de vivre, qu'un art de survivre où il faudrait se préoccuper du rendement au détriment de la qualité, et surtout du plaisir.

LE TRAVAIL DE LA TERRE

Après avoir choisi l'emplacement du potager, il faut souvent d'abord enlever le gazon; procédez par plaques que vous entasserez à l'envers; sèches, décomposées, on peut en récupérer la terre et se débarrasser des mauvaises herbes indésirables; quelques mottes peuvent servir à réparer des trous dans le gazon.
Sous le gazon, la terre est très dure; le labour traditionnel s'impose à la fourche-bêche, (dans notre terre lourde et caillouteuse) ou au motoculteur, (plus rapide et moins fatigant).
Au moment du labour incorporer du sable grossier pour alléger la terre; rajoutez éventuellement déjà du compost, sauf si le labour a lieu à l'automne ou en hiver.
Par la suite, dans une terre riche et travaillée régulièrement, un labour profond ne sera plus indispensable. D'après les thèses "bio" il représente même un danger pour les micro-organismes du sol, puisque les couches se retrouvent sens dessus dessous, les bactéries de surface étouffées au fond et celles du fond, incapables de survivre en surface. Le travail du sol consistant à l'ameublir, et à arracher les mauvaises herbes, on peut alors aérer la terre en plantant une fourche-bêche dans le sol et en la remuant d'avant en arrière, à moins de faire l'acquisition d'un "bio-cultivateur", (la fameuse "grelinette" qui permet de bêcher en profondeur sans retourner la terre), ou d'un "cultivateur". Ensuite au moment de préparer une planche pour un semis ou un repiquage, il suffit d'égaliser au râteau. Pour éviter d'avoir recours à la bêche lorsque la terre nue risque de se compacter, adoptez le "mulching", (voir le n°4 consacré à l'arrosage), qui évite à la terre de dessécher, aux mauvaises herbes de s'enraciner profondément; une planche du potager est-elle vide, semez un "engrais vert" pour occuper le terrain.

QU'EST-CE QU'UN ENGRAIS VERT ?

Ce sont des plantes produisant une grosse masse verte qui est fauchée et broyée juste avant la floraison, puis séchée à même le sol, et ensuite incorporée superficiellement à la terre avec un croc. Ces plantes, outre le fait qu'elles empêchent l'érosion du sol, améliorent la structure de la terre en l'ameublissant avec leurs racines, et en lui apportant de la matière qui se décompose rapidement et de l'azote, élément indispensable à la croissance des plantes.

  • La phacélie; voilà une plante à la jolie floraison estivale mauve, appréciée par les abeilles, qui pousse vite et qui s'intègre partout; n'étant en famille avec aucun légume, elle n'en a pas les besoins et n'est donc pas leur concurrente au potager.

  • Les légumineuses comme les trèfles, la vesce, le pois fourrager, la féverole, sont riches en azote si cher aux légumes voraces.

  • Pour préparer un nouveau coin, on conseille le semis de lupins dont les racines profondes ameublissent le sol.

  • Les crucifères comme la moutarde, le cresson ou le colza ne seront utilisés au potager que si vous ne cultivez pas de choux ou de radis qui sont eux-mêmes des crucifères. L'association au potager d'une majorité de plantes issues de la même famille s'assimile à la monoculture avec les risques accrus de maladies.

  • Les céréales d'hiver comme l'avoine, le seigle s'utilisent comme engrais vert semé en automne. On trouve dans le commerce des mélanges d'engrais verts avec ou sans fleurs.
    Mêmes des fleurs, (tournesols, soucis, capucines, vesces, bourrache etc...), semées en rangs serrés peuvent jouer le rôle d'engrais vert. Ou alors des légumes tels que la mâche ou l'épinard dont on consomme une partie avant les fortes gelées, le reste fera de l'engrais vert.

LES PLANTATIONS AU POTAGER

Les légumes que l'on trouve habituellement au potager n'ont pas tous le même mode de végétation, ils ont donc des besoins différents. Chacun puise dans le sol les éléments qui lui sont indispensables. Les légumes-feuilles, (salades, épinards, poireaux, choux), consomment surtout de l'azote, les légumes-racines, (céleri, carottes, raifort, radis, oignons, pommes de terre, betteraves-rouges), de la potasse et les légumineuses, (haricots, fèves, petits pois), des phosphates.

Les légumes sont aussi plus ou moins gourmands:
  • Les choux-fleurs et tous les légumes verts sont voraces et demandent beaucoup d'engrais organiques, beaucoup d'azote.

  • Les oignons et les légumes-racines ont des besoins plus modérés. Les légumes cultivés longtemps au même endroit, épuisent la terre en y puisant toujours les mêmes éléments; les légumes seront de moins en moins beaux. En outre la terre appauvrie et déséquilibrée sera plus sensible à l'apparition de nuisibles, de champignons ou de mauvaises herbes. Le maître mot sera donc: diversité des cultures et rotation des cultures.

Voici en abrégé un petit plan de rotation des cultures qui s'étale sur 3 ans, et sur 3 plates-bandes :

1° année:

    Plate-bande n°1: Sur une planche bien enrichie: plantes voraces, (choux, concombre, tomates, poireaux, courges, fraises)
    Plate-bande n°2: La plate-bande a accueilli l'année d'avant des légumes voraces,plantez-y des plantes moyennement voraces, (radis, salades, épinards, oignons, ciboulette ou fleurs annuelles)
    Plate-bande n°3: Plantes peu voraces, (petits pois, haricots), ensuite semez un engrais vert comme la phacélie, ou une céréale en hiver.

2° année:

    Plate-bande n°1: Légumes moyennement voraces
    Plate-bande n°2: Légumes peu voraces
    Plate-bande n°3: Après avoir mis du compost et de l'engrais organique, on met des légumes voraces.

3° année:

    Plate-bande n°1: Légumes peu voraces, puis on compense avec un engrais vert.
    Plate-bande n°2: Légumes voraces, après avoir bien fumé la planche avec du compost et de l'engrais organique éventuellement.
    Plate-bande n°3: Légumes moyennement voraces.

Les cultures associées : Voici encore une notion très prisée en culture "bio"; l'observation de la nature permet de constater que certaines plantes se protègent mutuellement de leurs parasites; d'où l'idée d'utiliser de telles associations au jardin. En voici quelques unes qui ont fait leurs preuves:

  • Le parfum du thym, de la sauge et de la menthe éloigne certains insectes volants comme la piéride du chou, (papillon blanc)

  • L'aneth et les oignons protègent les carottes

  • Les œillets d'Inde sécrètent par leurs racines une substance qui capte les anguillules, sorte de vers minuscules, protégeant ainsi les tomates, les roses ou les carottes plantées à proximité.

  • Lavande, céleri, ciboulette, sarriette d'hiver et tomates chassent les pucerons d'autres cultures.

  • Des fleurs d'été comme la capucine protège les arbres fruitiers et les tomates des pucerons verts et lanigères.

  • La sarriette éloigne les pucerons des haricots nains

  • L'ail lutte contre la rouille et l'oïdium de nombreuses plantes.

Il n'est bien sûr pas possible de tout planter dans un petit potager. Mais toutes ces notions donnent bien l'étendue des interactions entre la terre, les plantes et les animaux et pour finir, les hommes.
Vous avez également pu constater qu'il n'y a pas de raison de proscrire du potager tout ce qui n'est pas légume, puisqu'on fait appel à certaines fleurs pour les protéger, sans oublier qu'elles attireront également les insectes pollinisateurs. Et puis un peu de couleurs vives égaieront toute cette verdure!

Voici donc quelques idées pour rendre votre potager plus attrayant. Mettez-le en scène comme toute autre partie de votre jardin:

On peut protéger le potager par une petite barrière rustique ou un grillage, ou même une haie basse pour marquer par exemple les limites du terrain de jeu des enfants ou du chien.

Ou bien délimitez-le d'un coté par des fruitiers en espaliers ou en petits buissons, ou quelques framboisiers; d'un autre côté par une petite haie taillée de petits buis, ou de lavande, ou de thym et autres condimentaires, un autre coté encore par une mince plate-bande de fleurs vivaces et de quelques bulbes pour la fin de l'hiver et le printemps. S'il jouxte un grillage, faites-y grimper des capucines ou des pois de senteur, ou des coloquintes etc., ou servez-vous en comme d'un tuteur pour attacher des fleurs sensibles au vent, (des pivoines ou des asters d'automne par exemple).

Vous pouvez faire une entrée à votre potager, un petit portillon de bois, ou un arceau sur lequel poussera un rosier ou une clématite; ou bien marquer de chaque côté le seuil par un rosier-tige ou tout autre plante formée par la taille. En vous référant au chapitre des cultures associées, entourez certaines plates-bandes d'une petite bordure d'œillets d'Inde ou bien de basilic, ou bien de radis en attendant que les plants de salades occupent tout le terrain.
Intercalez de-ci de-là une rangée de fleurs annuelles que vous aurez semées pour la confection des bouquets.
Au moment de semer, ayez la main légère, cela vous évitera de devoir jeter de nombreuses plantules au moment d'éclaircir le semis. Il n'est pas obligatoire de vider tout le paquet de semence. Si vous voulez conserver des graines, enfermez le sachet dans une boîte en plastique en compagnie de grains de riz pour lutter contre l'humidité.
La proximité d'un arbre ou d'un buisson attirera des oiseaux qui sauront vous débarrasser de quelques parasites indésirables.

Gageons que ces quelques suggestions stimuleront votre imagination pour créer votre potager unique et accueillant.

Fin

    L'Association pour la Protection de la Qualité de Vie à La Wantzenau adresse ses vifs remerciements au Service de l'ECOLOGIE URBAINE de la COMMUNAUTE URBAINE de STRASBOURG qui lui a accordé une importante subvention, grâce à laquelle la poursuite de ces publications est possible.

Rédaction: Frédérique Aubertier - Illustration: André Boos
Mise en page version papier: Joseph Baruthio - version Internet: Alain Hausknecht

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